Le logement social à Suresnes, une fierté et une chance à partager

février 2022

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La Ville veut maintenir et équilibrer son parc de logements sociaux qui représente 36% de ses habitations. Elle renforce la transparence sur les mécanismes de leur attribution.

Textes : Arnaud Levy, Thierry Wagner

Photos : Romain de Sigalas, Marine Volpi

Suresnes est fière de son histoire et de la richesse de son patrimoine et c’est tout particulièrement le cas de son parc locatif social, fruit d’un long engagement pour construire et faire vivre une ville à la mixité harmonieuse.

Avec 7 664 logements sociaux répartis dans tous les quartiers -soit 35,92 % : bien au-dessus des 25 % fixés par la loi SRU en Ile-de-France- la Ville demeure à la fois exemplaire et fidèle à elle-même en dépit d’un contexte de pression immobilière toujours plus forte, et alors que le foncier disponible s’est raréfié.

Suresnes veut continuer à mener une politique de l’habitat équilibrée en accueillant toute la gamme de logements conventionnés, du logement social pour les plus défavorisés jusqu’au logement intermédiaire à destination des familles aux revenus moyens.

Car 80 % de la population française est aujourd’hui éligible à un logement social ou intermédiaire avec des modalités de financements adaptées à toutes les tranches de population. Contrairement à des idées reçues qui persistent, le « social » n’est ni réservé aux plus pauvres ni un logement au rabais. A Suresnes, un soin tout particulier a été mis à son intégration à l’environnement architectural.

Mieux régler les problèmes du quotidien

La Ville veut être garante de la qualité de vie dans les résidences sociales, équilibrer davantage encore leur répartition géographique et mieux informer sur les conditions d’attribution des logements. Elle a donc renforcé la transparence dans l’attribution des logements en ouvrant dans un premier temps aux représentants des locataires de l’UNLI et de la CNL (lire ci-dessous), sa Conférence communale du logement (CCL) qu’elle avait mise en place sans obligation légale dès 1996.

Cette instance comprend aussi un représentant de l’opposition municipale (aujourd’hui, Nicolas d’Asta). Pour chaque logement qui se libère trois candidats doivent règlementairement être proposés : la CCL procède donc à un examen anonymisé de ces dossiers et définit un ordre de priorité.

La transparence est d’autant plus nécessaire que les attentes sont élevées : en effet pour 400 logements qui se libèrent en moyenne chaque année on compte 2 000 demandes en cours au service Logement de la Ville auxquelles s’ajoutent les 10 000 formulées en ligne via le Système national d’enregistrement qui ont retenu Suresnes parmi les souhaits.

Dans ce contexte, le travail d’écoute et d’accompagnement du service Logement s’avère précieux. Soucieuse aussi de mieux régler avec les bailleurs les problèmes d’entretien du quotidien, la municipalité met en place avec les locataires et les bailleurs sociaux un Comité de suivi des résidences sociales.

Aude et Yannick ont « le cadre idéal pour une vie familiale »

Elle dit savoir qu’ils ont eu « beaucoup de chance» et ajoute en souriant que « sauf si les toilettes avaient été au milieu du salon elle ne se voyait pas refuser». Et de fait, l’appartement où Aude Dumottier a emménagé en novembre avec son compagnon Yannick Forlac et leurs 4 enfants a un standing de choix : 130 m2 , 3 chambres, avec vue imprenable au cœur de la Cité-jardins…

Mais ce qui leur importe c’est qu’ils disposent désormais « d’un cadre idéal pour commencer une vraie vie familiale». Mère célibataire, Aude s’était déjà vu attribuer un 3 pièces place Stalingrad à la naissance de sa fille aînée. Quand Yannick emménage avec elle, ses deux enfants – Owen, 7 ans, et Noam, 5 ans – dont il a la garde partagée, partagent la chambre de Maelane, 6 ans.

En mai 2020, enceinte d’Amelia, 11 mois aujourd’hui, Aude dépose au service Logement une demande pour une pièce de plus.« On voulait une chambre pour accueillir les enfants de Yannick et avoir chacun son espace».

Suresnoise de naissance et de cœur, infirmière à l’hôpital Foch, elle ne se voit pas quitter «sa » ville et si possible la Cité-jardins. «Je me sens bien à Suresnes, j’y ai ma famille, j’y travaille… Je savais que je cochais les cases mais l’inconnu c’était combien de temps. Nous sommes conscients de notre chance : on a eu le combo magique ».

Le bonheur pour Aude ? C’est « de pouvoir mettre tous les enfants autour de la table», d’avoir pu recevoir pour la première fois sa famille à Noël. Et de se dire que désormais c’est certain, «sauf si c’est pour acheter», elle ne quittera pas Suresnes.

 

“ Nous sommes persuadés que le logement social est une chance pour construire une

 

ville mixte et équilibrée mais aussi pour vivre dans des résidences valorisantes avec un vrai esprit collectif. C’est aussi un logement pour tous et notamment les familles de classe moyenne éligibles au logement social mais qui parfois ne le sollicitent pas parce qu’elles sont persuadées, à tort, de ne pas répondre aux critères d’accès. On ne pourra pas satisfaire toutes les demandes tant la pression est forte mais notre engagement est celui de la transparence des attributions et de l’écoute attentive de toutes les situations.

Cecile Guillou, Conseillère municipale déléguée Politique du Logement et de l’Habitat

Bruno Jacon Conseiller municipal, Logement et Habitat

 

QUELS LOGEMENTS POUR QUELLES TRANCHES DE REVENUS ?

La Ville veut continuer à mener une politique de l’habitat pour une mixité sociale harmonieuse en accueillant toute la gamme de logements conventionnés, depuis le logement social pour les plus défavorisés jusqu’au logement intermédiaire à destination des familles aux revenus moyens. Elle souhaite maintenir le taux d’un tiers de logements sociaux, répartis dans tous les quartiers.

Plafonds de ressources annuelles (en euros, applicables au 1er janvier 2022).

Les ressources prises en compte sont les revenus fiscaux de référence inscrits sur les avis d’imposition de chaque personne vivant dans le foyer : de l’année N-2 (soit le revenu fiscal de référence 2020) ou de l’année n-1 si les ressources concernées ont diminué d’au moins 10 % par rapport à l’année N-2.

Pour Géraldine, une attribution comme une libération

En entrant dans son appartement de la résidence de l’Europe, elle est passée de l’angoisse au soulagement. Depuis son emménagement en septembre dernier dans ce lumineux 3 pièces de 66 m2 , Géraldine Begny, 36 ans, a le sentiment d’avoir eu « enfin un peu de chance ».

En février 2021 Géraldine et son compagnon se séparent. Mais avec des contrats courts et un salaire de 1 300 euros nets, impossible pour cette Suresnoise depuis 7 ans de se loger dans le privé. Contrainte de continuer à cohabiter, elle se sent ensevelie sous les difficultés. « J’étais mal : la séparation, l’incertitude sur mon travail, la peur de ne pouvoir me loger. J’avais l’impression de ne pas sortir la tête de l’eau ».

« Beaucoup d’attention »

Au service Logement où elle a demandé un 3 pièces « pour que ma fille ait sa chambre », elle reçoit «beaucoup d’attention à ma situation et de soutien pour monter mon dossier ». Mais on la prévient aussi : la procédure peut prendre des années.

En mai, première visite. Un 2 pièces, « avec une seule chambre toute petite: en sortant j’ai pleuré : je ne pouvais pas accepter, mais j’avais peur qu’on ne me propose plus rien… ».

Le problème c’est que Célia, 3 ans et demi, est fiscalement rattachée à son père : Géraldine ne peut prouver que sa fille est à sa charge et n’est pas éligible aux 3 pièces.

Mais avec le conseil du service et de Hauts-de-Seine Habitat, elle fournit durant l’été des documents attestant de la réalité de sa garde. Fin août, seconde proposition. « J’ai été surprise que ca revienne aussi vite. Dès que je suis entrée, ça a été un coup de cœur ».

Cette attribution est au fond une libération. « Mon appartement c’est mon cocon. Quand je passe le pas de la porte mes soucis disparaissent. Ça me permet enfin de souffler ».

Le service Logement : un rôle précieux d’écoute et d’accompagnement

Rien ne vaut le contact humain. Les 5 agents du service Logement assurent le suivi de 2 000 demandes en cours et accordent à chaque dossier une écoute personnalisée. S’ils n’ont pas les moyens de réduire le déficit de logements sociaux par rapport à la demande, leur rôle de conseil et d’accompagnement se révèle précieux (lire témoignages ci-dessus) pour orienter les demandeurs et les aider à constituer et mettre à jour leur dossier au cours de la procédure.

Le service prépare le travail de la Conférence communale du logement. Pour chaque logement qui se libère dans les contingents gérés par la Ville (les logements dont elle est directement réservataire et ceux de Hauts-de-Seine Habitat, plus gros bailleur social sur le territoire de Suresnes) celle-ci propose 3 candidats classés par ordre de priorité aux commissions d’attribution des bailleurs auxquelles la Ville est également représentée.

Quel rôle pour les représentants des locataires ?

Depuis janvier 2021, la Ville a renforcé la transparence dans l’attribution des logements en ouvrant la Conférence communale du logement à deux fédérations de locataires présentes à Suresnes.

Eliane Lacombe, Présidente du conseil local des amicales de locataires de la CNL (Confédération nationale du logement)

« Le conseil local fédère une dizaine d’amicales de locataires suresnois sur le patrimoine de Hauts-de-Seine Habitat. La CNL est aussi une association nationale de consommateurs et à ce titre nous défendons les locataires qui rencontrent des difficultés avec leur bailleur.

Nous sommes bénévoles. En commission d’attribution, nous contribuons à déterminer l’ordre des 3 candidats que l’on doit proposer pour un même logement. J’apprécie d’être dans cette commission où tout est dit et tous les critères mis sur la table. On travaille en bonne intelligence. En revanche, la CNL n’est pas favorable à la vente des logements HLM pour l’accession sociale à la propriété.

Nous pensons qu’il faut la favoriser en construisant des logements destinés à cela, comme par exemple à la résidence Sisley, mais pas en prenant sur ceux qui sont actuellement en location, même si la ville est bien au-delà des 25 % de logements sociaux imposés par la loi SRU. Il faut que les jeunes Suresnois puissent rester à Suresnes. »

 

Dominique Paranteau, Secrétaire générale de l’UNLI Suresnes (Union nationale des locataires indépendants) et présidente de l’association UNLI Jacques Decour

« Intégrer les représentants des locataires est un gage de transparence. Il n’y a pas de copinage. Les dossiers sont anonymes quand ils arrivent en commission mais l’adresse du demandeur figure sur le dossier et la commission donne priorité aux Suresnois. Déjà présents à Europe, Cité-jardins, Tuileries, Jacques Decour, aux Chênes, l’objectif de l’UNLI est de trouver des personnes qui puissent s’investir dans l’association dans toutes les résidences, parce qu’au-delà de la commission d’attribution des logements, il faut aussi faire face à « l’après », aux problématiques de qualité de vie que l’on attend du bailleur.

Mieux vaut agir collectivement qu’individuellement auprès du bailleur. Les problèmes ne sont pas les mêmes dans toutes les résidences : nécessité de rénovations, entretien des parties communes, incivilités…»

A la résidence Henri IV on cultive l’esprit village

Elle forme comme un village caché dans le village du centre-ville. La résidence Henri IV étale ses 68 logements et ses 7 bâtiments dans une succession de porches et de courettes, bordées par la place du général Leclerc, l’impasse du Cygne, et les rues des Bourets et Emile Zola.

A chacune de ses six entrées, c’est à peine si on remarque la façade en béton à l’architecture années 80 de cette résidence inaugurée en 1989, signe de la volonté ancienne d’intégrer sans rupture les résidences sociales dans le tissu architectural de la ville.

«Ici les gens sont bien. En plein centre-ville piéton, à deux pas du marché et des commerces, et sans un bruit de voiture… », résume Béatrice André, la gardienne de la résidence. «Je peux vous dire que sauf des déménagements pour départ à la retraite ou pour un agrandissement familial par exemple, il n’y pas beaucoup de vacance».

Tranquillité

Béatrice André, 35 ans de métier, se veut « proche et à l’écoute» de «ses» résidents. qu’elle décrit « de toutes origines, tous âges et de toutes compositions familiales», qui sont « attentifs les uns aux autres» et qui apprécient «la tranquillité de la vie de quartier».

Elle est le relais entre les locataires, le bailleur Hauts-de-Seine Habitat, le syndic qui – particularité de cette résidence – gère les parties communes, et les entreprises et artisans qui se succèdent pour procéder aux inévitables interventions d’entretien.

« Mon quotidien c’est de veiller à la propreté des lieux, au respect du règlement dans les cours, les couloirs ou le parking et d’aider à résoudre tous les problèmes du quotidien

 

Des situations particulières

Les ressources ne sont pas le seul critère pour obtenir une place en logement social. Les commissions d’attribution prennent en compte certains critères de priorité. Les personnes en situation de handicap, les mal-logés, les défavorisés ou les victimes de violences conjugales sont susceptibles d’obtenir un logement social plus rapidement que les autres. D’autant plus si les candidats entrent dans le cadre du dispositif du Droit au logement opposable (DALO).

Cependant, il est bien sûr possible d’obtenir l’attribution d’un logement social sans critère d’urgence absolue en fonction des disponibilités dans un souci de mixité sociale ou dans le cas de situations telles que : divorce, séparation, fin de bail, loyer actuel trop cher, mutation HLM, jeune en recherche d’un premier logement, projet de couple, ou tout simplement famille qui s’est agrandie.

La résidence des Très-Bourgeois bientôt rénovée

La résidence des Très-Bourgeois va bénéficier d’importants travaux de réhabilitation. Une concertation a été lancée par le bailleur Hauts-de-Seine Habitat et se déroulera jusqu’au 4e trimestre. Le démarrage des travaux devrait intervenir début 2023.

Ils porteront notamment sur la réfection de l’isolation et l’amélioration de la performance énergétique (pour atteindre le label BDC rénovation) et l’embellissement des parties communes. La Ville a demandé à Hauts-de-Seine Habitat que dans le cadre de cette réhabilitation les espaces extérieurs soient également retravaillés. Construite en 1967, cette résidence de 222 logements avait fait l’objet d’une première rénovation en 1988.

 

VRAI/FAUX

IL EXISTE BEAUCOUP DE LOGEMENTS SOCIAUX VIDES

FAUX

Les logements sociaux sont généralement réattribués dans le mois qui suit leur libération par le précédent locataire. Certains logements peuvent parfois rester vacants en raison de circonstances particulières : travaux de remise en état de l’appartement planifiés par le bailleur (remise aux normes etc.), problématique de décès et de succession, logement destiné à l’accession sociale à la propriété.

 

ON PEUT ATTRIBUER UN T4 A UN COUPLE AVEC UN ENFANT OU UN T3 A UNE PERSONNE SEULE

FAUX

La commission d’attribution des logements du bailleur (CAL) veille à ce que la typologie du logement attribué soit en adéquation avec la composition familiale (voir tableau page 28). Sont considérées comme « personne à loger » :

◗ le demandeur,

◗ le codemandeur: époux ou partenaire de Pacs ou concubin, ou un membre de la famille proche qui n’est pas à charge,

◗ les personnes et enfants figurant sur l’avis d’imposition du demandeur ou du codemandeur : enfants de moins de 21 ans (y compris en garde alternée si déclarés au domicile de chacun des parents), étudiants de moins de 25 ans, enfants handicapés quel que soit l’âge.

ON ATTRIBUE DES HLM A DES PERSONNES AISEES

FAUX

Pour obtenir un logement social, le total des revenus annuels des personnes vivant au foyer ne doit pas dépasser un montant maximum, variable en fonction du type de logement : HLM classique, PLS, Intermédiaire (voir tableau page 28). Par exemple, une personne seule qui cherche un logement social à Suresnes ne doit pas avoir des revenus de plus de 2 000 euros mensuels ou 5 600 euros mensuels pour un couple avec 3 enfants.

 

DES PERSONNES SEULES HABITENT DE GRANDS LOGEMENTS

VRAI et FAUX

L’évolution de la composition familiale permet au locataire d’un logement social de faire une demande d’échange pour une surface plus petite et un loyer moindre correspondant aux plafonds en vigueur. Un questionnaire est adressé chaque année aux locataires qui doit mentionner le nombre d’occupants et être accompagné de l’avis d’imposition de chaque personne domiciliée. Cependant certaines personnes dont les enfants ont quitté le domicile ne souhaitent pas déménager pour des raisons souvent affectives. Or la loi ne permet pas d’imposer leur relogement vers plus petit si elles ont plus de 65 ans.

 

ON A LE DROIT A 3 PROPOSITIONS DE LOGEMENT

VRAI et FAUX

Le chiffre 3 ne figure dans aucun texte réglementaire. Le refus d’une proposition après visite du logement ne rend pas le dossier de demande caduc. Néanmoins un refus sans justification argumentée peut être un frein à l’évolution de la demande et peut entraîner le retrait du caractère prioritaire d’une candidature.

 

AU BOUT DE 4 ANS D’ANCIENNETE DE LA DEMANDE DE LOGEMENT, ON EST OBLIGE DE NOUS PROPOSER UN LOGEMENT

FAUX

Néanmoins, ce délai considéré légalement comme « anormalement long » ouvre le droit d’ouvrir un recours au titre du Dalo (droit au logement opposable) auprès de la commission d’éligibilité de la Préfecture et justifier d’un droit d’attribution prioritaire si l’avis de la commission est favorable.

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