Réalisatrice, actrice, scénariste et romancière française : Laetitia Colombani a plusieurs casquettes. Après ses études à l’Ecole Louis Lumière, elle se lance dans l’écriture et la réalisation de courts-métrages. Elle travaille également dans le monde du spectacle.
En 2017, elle publie son premier roman La tresse. Il a très rapidement rencontré un énorme succès en France. Ce livre a reçu de nombreuses distinctions littéraires, a été traduit dans 40 langues et s’est vendu à plus de 2 millions d’exemplaires. En 2019, elle sort Les victorieuses qui s’est de nouveau classé rapidement dans les meilleures ventes, suivi par Le Cerf-volant en 2021.
Les femmes, leurs détresses, leurs combats et leur profonde humanité sont au cœur de ces trois livres.
Laetitia Colombani réalise elle-même l’adaptation cinématographique de La Tresse, tournée en Inde, Sicile et au Canada. Le film est en cours de montage et devrait sortir à l’automne 2023.
Après avoir écrit plusieurs scénarios, pourquoi êtes-vous passée au roman ?
Après quinze ans passés à travailler pour le cinéma, en tant que scénariste et réalisatrice, j’avais envie d’explorer un nouveau terrain de jeu, une nouvelle forme d’écriture. L’idée d’écrire un roman me trottait dans la tête depuis longtemps. Au cinéma, l’écriture est soumise à de nombreuses contraintes, de production et de faisabilité notamment. Le domaine de la littérature me semblait offrir plus de liberté, j’avais très envie d’essayer.
Je me vois comme un petit colibri, qui participe, à sa manière, à lutter contre un incendie.
Les femmes, leurs détresses et leur solidarité sont au cœur de vos romans. Pensez-vous qu’ils peuvent contribuer à changer l’image des femmes ?
A travers mes romans, je veux montrer, voire dénoncer les difficultés que les femmes rencontrent et les discriminations visibles ou invisibles dont elles sont l’objet, encore aujourd’hui, partout dans le monde. Je rêve d’un monde plus juste et beaucoup plus égalitaire, pour ma fille et les générations de femmes à venir.
Je me vois comme un petit colibri, qui participe, à sa manière, à lutter contre un incendie. Aussi minime soit-elle, chaque contribution compte. La cause est grande et le combat sera long. Un jour, un lecteur d’un certain âge m’a dit, en parlant de « la Tresse » : « Depuis que j’ai lu votre livre, je regarde ma femme autrement. » Cette phrase m’a réjouie !
La ville de Suresnes organise en Mars le mois de l’Egalité. Comment voyez-vous l’évolution du rôle des femmes dans la société ?
Cette évolution s’est faite à deux vitesses : dans nos sociétés occidentales, les femmes ont, en quelques décennies, investi le monde du travail, sans que leur charge dans la sphère domestique n’évolue. Elles portent beaucoup sur leurs épaules et leur charge mentale est extrême. Le monde du travail, en outre, se révèle parfois impitoyable : on demande aux femmes de travailler comme si elles n’avaient pas d’enfants, d’élever leurs enfants comme si elles ne travaillaient pas… tout en restant jeunes, belles et souriantes. Les injonctions sont nombreuses et les placent dans une position intenable.
Les solutions ? Il faut à mon sens s’inspirer des pays nordiques, bien plus inventifs que nous sur le plan de l’égalité au travail et à la maison. Il faut que les hommes investissent davantage la sphère familiale et domestique. Il est grand temps que les cartes soient redistribuées autrement.
Vous avez réalisé vous-même l’adaptation de la Tresse au cinéma ? Que retirez-vous de cette expérience ?
La réalisation de ce projet qui me tenait à cœur s’est révélée une incroyable aventure. Je suis partie tourner en Inde, en Italie et au Canada, dans trois langues différentes, avec des équipes et un casting international. J’ai mis quatre ans à préparer ce film et le tournage s’est étalé sur six mois. Le film est bientôt terminé et sortira en novembre prochain. Je suis en train d’écrire un livre sur cette expérience, intitulé « le Voyage de La Tresse », qui paraitra chez Grasset concomitamment à la sortie du film.
Votre mère est bibliothécaire. En quoi cela a-t-il influencé votre formation et votre écriture ?
J’ai grandi dans un environnement où les livres étaient très présents. J’ai été très tôt une grande dévoreuse de romans. La passion de la lecture a précédé celle de l’écriture. J’avais une appétence particulière pour les histoires, je voyageais à travers elles, je vivais dans un monde de fiction. J’étais une enfant très calme, qui me nourrissait de tous les livres qui me tombaient sous la main. J’ai grandi et me suis découverte à travers eux. Aujourd’hui, je ne peux imaginer ma vie sans livres. Ils restent pour moi une indispensable nourriture, et mon appétit de lire est intact.
Vos romans sont adaptés en albums jeunesse et en BD : qu’en pensez-vous ?
J’ai tenu à travailler moi-même sur les adaptations en album jeunesse de mes romans, avec l’aide de l’illustratrice Clémence Pollet. Nous préparons actuellement notre troisième album ensemble, adapté de mon dernier livre « le Cerf-volant », qui paraitra chez Grasset Jeunesse en novembre prochain. La bande dessinée écrite par Lylian et Algésiras, publiée en décembre dernier aux Editions du Soleil, est un projet mené par ces deux auteurs, qui livrent leur vision personnelle en images de « La Tresse ».