Bill Gates l’a listé comme « l’un des dix meilleurs informaticiens au monde », confie sans forfanterie Béatrice Dellenbach, à propos de son époux Olivier. On la croit sur parole tant cet ingénieur passé par Polytechnique a surfé avec succès sur plusieurs révolutions informatiques. A la fin des années 80, lorsque l’ordinateur commence à se démocratiser, il fonde Nat System, qui déploie des outils informatiques en entreprise et finit par taper dans l’oeil de Microsoft. L’affaire revendue, il profite de l’envol d’internet pour créer eFront, fournisseur de solutions logicielles dédiées à la finance, qu’il développe avec son épouse et qu’il revendra en 2019 pour… 1,5 milliard de dollars, propulsant son couple dans le club des 500 plus grandes fortunes françaises.
Un couple entrepreneur…
Depuis deux ans, Olivier et Béatrice Dellenbach se concentrent sur ChapsVision, un éditeur de logiciel d’exploitation de données. Le couple fonctionne comme un binôme : diplômée de l’ESCP, Béatrice s’occupe de la partie commerciale et des ressources humaines quand son époux se focalise sur la recherche et le développement. « C’est un visionnaire, mais qui réfléchit toujours aux déclinaisons pratiques des avancées technologiques. La révolution de la data nous a séduits. Il y a tant à faire, mais les entreprises sont parfois perdues, conscientes d’être assises sur une mine d’or sans savoir comment l’exploiter. Notre métier consiste à rassembler toutes les données internes aux organisations, mais aussi externes, pour leur donner du sens et créer de la valeur », détaille la directrice générale adjointe. « Au fil des ans, ChapsVision a racheté « de belles endormies » aux métiers complémentaires qui offrent à nos clients une vision à 360 degrés et un seul interlocuteur. »
L’entreprise suresnoise épaule ainsi de nombreuses entreprises (Danone, LVMH, SNCF), des collectivités locales, et a si bien grandi qu’elle emploie aujourd’hui 320 collaborateurs et déclare 35 millions de chiffre d’affaires pour cette année. Et elle n’envisage pas de s’arrêter là : « Nous avons envie de nous développer sur l’Europe, confie Béatrice Dellenbach. Il y a besoin de géants français du numérique. »
… et philanthrope
Le développement de ChapsVision n’est pourtant pas la seule ambition du couple. Dès le début de cette nouvelle aventure, il a adossé son entreprise à une fondation consacrée à un sujet qui les touche de près : le handicap. « Nous avons cinq enfants et notre quatrième, Clara, est handicapée mentale assez sévère. Avoir un enfant handicapé, c’est prendre conscience de la fragilité et de l’interdépendance. C’est une motivation supplémentaire. » HappyCAP (condensé de « happiness » et « handicap ») vient en aide aux familles, associations, et professionnels dans le besoin, et finance trois à cinq projets par an. Elle soutient également la CAA (Communication Alternative Augmentée) qui permet à ceux qui ne parlent pas de trouver leur place parmi les autres, grâce à HappyCAA dont l’objectif est de mettre en lumière toutes les solutions, innovantes et souvent méconnues.
La philanthropie bouillonnante de Béatrice Dellenbach se diffuse également au sein de ChapsVision. Par l’intermédiaire de Patrick Puissant, chargé des relations Entreprises à la mairie de Suresnes, dont elle loue le dynamisme entrepreneurial, la société a pu entrer en contact avec l’Etablissement et service d’aide par le travail (Esat) de Suresnes et embaucher deux personnes dans la « Happy Team ».
Une réussite qui a du sens
« Elles travaillent aux services généraux, s’occupent de l’accueil des clients et, depuis peu, de la conciergerie. L’idée est aussi de faire se rencontrer les gens différents et qu’ils apprennent à s’apprécier. » Occasionnellement, la DG met les bonnes volontés du groupe à contribution. « Avec une trentaine de salariés, nous commandons des pizzas et réalisons des cahiers illustrés de pictogrammes qui sont expédiés à des enfants handicapés. Ces cahiers leur permettent de pointer des images pour communiquer avec leurs proches. » Le handicap de leur fille a été « une épreuve très difficile, confie-t-elle, mais qu’il a fallu transformer. Nous sommes tous deux des battants et nous avons eu de la chance. Cette fondation donne du sens à ce que nous faisons. » Parce que la réussite n’a de sens que si elle est partagée.