Le « serious game », ou « jeu sérieux » enversion française, n’est pas né avec la première console Nintendo. Dès la fin du XVIIIe siècle, l’armée prussienne se servait du jeu pour entraîner ses soldats à répondre à différentes stratégies d’attaque. Un siècle plus tard, l’armée américaine formalisait même cette méthode en organisant une grande campagne de recrutement grâce au jeu vidéo.
Permettre aux salariés de se former par le biais du gaming n’était pourtant pas la vocation première de Serious Factory. La « vieille » start up suresnoise lancée en 2007 par William Pérès, ingénieur en aéronautique, et Pierre Susset, développeur, concevait à sa création des modélisations en 3D pour ses clients. Petit à petit, l’entreprise, tout en conservant son expertise 3D, s’est tournée vers la formation par la simulation et l’immersion, avec l’idée que l’apprentissage se ferait plus facilement par la mise en situation et l’expérimentation, que par un cours magistral et des documents Power Point. « La réponse auprès des clients a été immédiate et très positive. Nous avons continué sur ce marché très porteur et pu faire une levée de fonds d’1,2 million d’euros en 2015 », raconte Guillaume Ruzzu, chargé de marketing et de communication de Serious Factory, « avant de franchir une nouvelle étape ».
La simulation permet de préparer aussi bien les cadres à la bonne conduite d’un entretien individuel, aux managers de mener une réunion efficacement, ou aux agents opérationnels de prévenir les risques et de se sensibiliser aux bonnes pratiques, par exemple sur un chantier.
Former, c’est bien, mais permettre aux entreprises de le faire elles-mêmes, c’est encore mieux. « Lorsque nous avons débuté, les systèmes restaient encore chers et complexes », ajoute le communiquant. Serious Factory a donc inventé un premier logiciel – VTS Editor – peu coûteux qui a permis aux entreprises de créer leurs propres solutions, sans avoir pour autant besoin de maîtriser la technique ou de faire preuve de compétences particulières. Ce logiciel leur offre la possibilité de choisir le décor et les personnages de son jeu de rôle afin d’être au plus proche de la situation réelle, en entreprise. Cela permet de démocratiser l’apprentissage et d’offrir une expérience d’immersion au plus grand nombre. » Un joli calcul qui a permis à son chiffre d’affaires de faire un bond de 90% (!) en 2016, juste après la sortie de VTS Editor. Deux ans plus tard, l’entreprise a fait unvenouvelle levée de fonds de 3 millions d’euros.
Serious Factory compte aujourd’hui des clients dans tous les secteurs. Grands groupes ou PME, organismes de formation, agences d’interim, grande distribution, BTP… La simulation permet de préparer aussi bien les cadres à la bonne conduite d’un entretien individuel, aux managers de mener une réunion efficacement, ou aux agents opérationnels de prévenir les risques et de se sensibiliser aux bonnes pratiques, par exemple sur un chantier. Le serious game est également très utilisé dans le domaine de la santé, pour mieux comprendre les pathologies et leurs prises en charge par le personnel soignant et les aidants. Il peut aussi servir à l’embauche, et même en phase de prospection, pour faire naître des vocations chez des personnes en recherche d’emploi.
Une quarantaine de salariés
L’entreprise a ainsi organisé l’hiver dernier un jeu immersif pour la SNCF qui cherchait à recruter dans les métiers de la circulation ferroviaire, en faisant tester aux candidats toutes les facettes du métier. À Suresnes, Serious Factory emploie une quarantaine de salariés de tous profils, du développement au graphisme, de la pédagogie au marketing. En plein boom, elle voit loin, très loin.
« Pour les années à venir, nous espérons poursuivre notre belle croissance (70% annuels) et continuer de travailler à l’international avec des pays francophones et anglophones, explique Guillaume Ruzzu, tout en gardant notre part d’innovation. Il faut tenir compte des nouveaux usages : les casques de réalité virtuelle et les tablettes permettent un entraînement plus poussé encore. Nous sortons de la formation « tout seul derrière son ordinateur » pour envisager des expériences collaboratives sur plusieurs supports digitaux. » L’avenir est au jeu !