C’est un domaine dans lequel Suresnes fait figure de pionnière. La Ville est en effet une des premières de France à s’être engagée dès 1995 dans une politique de prévention de la récidive. Cette participation à une justice de proximité concernant notamment les jeunes, vise à responsabiliser les auteurs de délits et d’infractions, à rendre lisible la réponse judiciaire à la délinquance, à lutter contre l’augmentation de la délinquance des mineurs et à favoriser la réinsertion sociale et professionnelle des personnes condamnées à des peines de prison.
Concrètement, cette politique se traduit par plusieurs dispositifs :
◗ l’intégration dans les services municipaux de mineurs de 16 à 18 ans ou d’adultes condamnés à des travaux d’intérêt général (TIG),
◗ l’intégration de mineurs (à partir de 13 ans) condamnés à une réparation pénale,
◗ l’intégration de jeunes de 18 à 30 ans placés sous main de justice,
◗ l’organisation de stages citoyens de réparation pénale.
Toutes ces sanctions ne sont pas décidées par la Ville mais par les autorités judiciaires. Même si les dispositifs restent une sanction, les personnes accueillies ne sont pas rémunérées, ils doivent favoriser la réinsertion pour que ces dernières repartent sur de bonnes bases. Et à chaque fois les personnes accueillies sont étroitement encadrées par les équipes des services de la Ville qui les accueillent et un tuteur les accompagne au plus près.
Réparation et réinsertion
Orientées par le service pénitentiaire d’insertion et de probation et la protection judiciaire de la jeunesse, trois personnes ont déjà été accueillies en 2021 pour une réparation pénale (1 aux ateliers municipaux et 2 personnes au service des Parcs et jardins). Côté TIG, 14 personnes ont effectué un passage au sein de la Ville au cours de la même période, ce qui représente 1600 heures (12 au service des Parcs et jardins et 2 au service Restauration). Des personnes placées sous main de justice sont donc aussi accueillies dans des services de la Ville et là aussi encadrées par un tuteur. Leur profil : placées en détention, elles sortent plus tôt de prison grâce à un aménagement de peine. Et c’est ici que Suresnes intervient par une action à plus long terme puisqu’elles sont accueillies 6 mois. Il s’agit ici à la fois de réparation et de réinsertion sociale et professionnelle après une condamnation, puisqu’elle les accompagne dans l’élaboration de leur projet professionnel en leur proposant notamment un suivi au sein du service Vie économique et emploi. Parfois les résultats dépassent les attentes (lire encadré).
Dernier dispositif destiné à prévenir la récidive : les stages citoyens, qui durent deux ou trois jours. Ils sensibilisent les jeunes aux valeurs de la République, favorisent l’exercice d’une citoyenneté active et la réflexion autour de plusieurs thématiques liées à la citoyenneté et la prévention (prévention routière, discriminations…). Ils sont mis en place en partenariat avec la Protection judiciaire de la jeunesse. Les prochains stages sont prévus en juillet.
Les stages citoyens visent les mineurs auteurs d’infractions pénales. Ce dispositif de réparation pénale les invite à réfléchir aux conséquences de leur comportement ou de leurs actes délictueux, les sensibilise aux risques encourus sur le plan civil et pénal, les responsabilise dans leur rôle de citoyen, et leur fait prendre conscience de leurs droits mais également des obligations qu’implique la vie en société. Louable dessein.
Embauche après une erreur de parcours
Romain, accueilli pendant trois semaines en mars et avril dernier au sein du service Restauration, vient d’y décrocher un contrat d’un an. « Son passage s’était tellement bien passé que nous avons décidé de l’embaucher », confirme Dominique Brun, à la tête du service. « J’ai eu aussi la chance que la tâche que l’on m’a confiée corresponde à ma dernière formation de manutentionnaire, complète le jeune homme de 36 ans. Mon rôle est de vérifier la qualité et la quantité des marchandises livrées, si elles proviennent du bon fournisseur, de contrôler la température. » Le caractère et le sérieux de Romain, salué par tous, ont renversé la tendance et prouvé tout le potentiel des dispositifs visant à prévenir la récidive et favoriser la réinsertion professionnelle, pour éviter qu’une « erreur de parcours ne se finisse en catastrophe ». A l’inverse, dans le nouveau parcours professionnel de Romain, cela a constitué une première expérience dans un domaine où les employeurs se font frileux et demandent à leurs futures recrues de ne pas être entièrement débutantes. Ce que Romain n’est plus maintenant.
De son côté, Dominique Brun estime que ces expériences sont très enrichissantes pour elle et son équipe. « C’est une démarche d’ouverture vers les autres : nous apprenons à être tolérants tout en transmettant des savoir-faire. Même si cela demande un gros investissement de notre part : certains n’ont pas un rapport très simple à l’autorité. D’autant que notre service est très réglementé, notamment au niveau de l’hygiène et des horaires. » A l’entendre, offrir cet accueil, de qualité, est tout naturel. « Nous nous devons de leur ouvrir les portes des entreprises et du monde du travail. Tout le monde n’a pas un parcours de vie parfait, cela peut aussi dépendre du contexte social et familial », insiste-t-elle. Romain confirme : « Dominique Brun ne juge pas mais essaie de comprendre… »
Grégory Le Moigne, chef de production au service Restauration était le tuteur de Romain.
« Nous abordons les personnes que nous accueillons et encadrons comme les autres employés. Nous sommes simplement plus vigilants, attentifs et à l’écoute. C’est une grande satisfaction de transmettre nos savoir-faire en les remettant en selle, leur redonnant goût au travail », assure-t-il.
David, en TIG au service restauration : « Les bêtises, c’est fini. »
Pendant deux semaines, j’ai travaillé à la plonge généralement. Ce n’est pas mon métier puisque je cherche à présent un emploi d’agent immobilier. J’ai beaucoup apprécié cette expérience, j’ai été bien accueilli, on m’a montré ce que je devais faire, j’ai appris plein de petits trucs, même à cuisiner des plats, comme des desserts. J’ai découvert que ce n’était pas une activité facile, on reste debout durant des heures. Le personnel était très sympathique. Faire des TIG m’a évité de faire de la prison et, j’en suis convaincu, les bêtises c’est fini…
Yoann Lamarque, adjoint au maire délégué a la Sécurité et à la Prévention
« Renforcer les outils de prévention de la récidive est un engagement de notre
contrat de mandat. La volonté de la municipalité est de rendre plus lisible
notre réponse face aux actes délictueux, de donner davantage de cohérence
à la sanction afin que celle-ci soit mieux comprise par l’auteur des faits. Lors
du conseil municipal du 27 mai, nous avons souhaité renforcer ces outils de
prévention de la délinquance, en adoptant la mise en place du rappel à l’ordre
lorsque les fauteurs de troubles sont clairement identifiés. »