Ressusciter les géants du ciel, ici des baleines volantes (pour « Flying Whales ») afin de faciliter le transport de charges très lourdes (avec une capacité de 60 tonnes maximum) dans des zones peu accessibles par la route et le rail, c’est le pari de Flying Whales, jeune entreprise née en 2013 et basée à Suresnes, dont nous dressions le portrait il y a un peu plus de deux ans (Suresnes mag 304, février 2019). La société a franchi un nouveau cap en annonçant en juillet dernier que sa première ligne d’assemblage serait située sur la commune de Laruscade, en Gironde.
« Le projet s’achemine vers sa phase industrielle, une étape importante pour nous. Nous allons passer d’une société qui est aujourd’hui une sorte de bureau d’étude à une vraie entreprise industrielle développant des engins aéronautiques. La construction de l’usine débutera courant 2021, et le premier vol du premier dirigeable est prévu pour 2023 », explique Romain Schalck, son responsable de la communication. « Il faudra ensuite compter un an et demi de tests au sol et en vol pour obtenir toutes les certifications nécessaires afin d’opérer commercialement pour 2025. »
Dirigeables en série
Passée cette phase, Flying Whales envisage en effet la production en série de plusieurs dirigeables en implantant des sites de construction en Chine et au Québec. En décembre 2019, l’entreprise a opéré une nouvelle levée de fonds de 30 millions d’euros en faisant entrer le gouvernement du Québec au capital.
« Ce dernier est monté au même niveau que l’entreprise chinoise AVIC General Aircraft. A cette occasion, nous avons fait entrer de nouveaux actionnaires français, puisque le groupe Bouygues, le groupe ADP et Air Liquide nous ont rejoints et apporteront en tout 15 millions d’euros. » A terme, Flying Whales sera à la fois constructeur et opérateur. « Toutes proportions gardées, nous serons en même temps le Airbus et le Air France du dirigeable. En plus des unités de production, une entreprise sera dédiée à opérer des dirigeables Flying Whales pour le compte de tiers, donc à fournir une prestation de transport par dirigeable », détaille Romain Schalck.
130 collaborateurs à Suresnes
Pour le Québec et le Canada, l’enjeu est d’importance. « Plus on se dirige vers le nord, plus les infrastructures de transport sont limitées. Pour autant, on dénombre beaucoup de communautés, notamment autochtones, dispersées jusqu’à des parallèles assez élevés. Cela pose problème aux différents gouvernements, provinciaux et fédéraux, qui ont du mal à répondre aux besoins de ces populations-là. Le Québec et le Canada sont intéressés par le déploiement de cette solution qui leur permettrait de connecter des régions entières en déficit d’infrastructures sans avoir à débourser des milliards de dollars pour construire des routes ou du rail qui ont, en plus, un impact important sur l’environnement. » L’engin, qui consomme en effet 30 fois moins d’énergie qu’un avion ou un hélicoptère pour un même tonnage, deviendra 100% électrique…
A Suresnes, l’équipe comprend aujourd’hui 130 collaborateurs. Pour l’usine girondine, elle envisage d’employer de 200à 300 personnes. « Ce sera une ligne d’assemblage inédite et vraiment immense, puisque le dirigeable mesurera près de 200 mètres de long et 50 mètres de diamètre. Soit la plus grande machine volante au monde. Ces méthodes inédites dans le monde vont nécessiter la formation d’opérateurs. » Le monde d’après a déjà commencé.