Confinement J30, 8h45. Dominique Lacoutière n’a pas croisé grand monde depuis qu’elle a quitté Rueil. Trente ans qu’elle rejoint le Centre médical municipal Raymond Burgos à pied, trente jours que le trajet de 45 minutes depuis son domicile est un peu plus solitaire. Outre l’accueil physique, Dominique participe à la prise en charge des patients avec la centrale d’appels qui fonctionne à plein. « Les patients entrent dans le centre un par un. Une fois à l’intérieur, des palissades les séparent et matérialisent deux parcours hermétiques : non Covid et Covid. Les cabinets du rez-de-chaussée sont réservés à ces derniers », explique Dominique Lacoutière. Pour elle, comme pour les autres agents du CMM, le constat est clair : l’activité physique est en forte baisse.
Confinement J30, 12h. Isabelle Landemaine, qui intervient après Dominique, vient d’orienter deux Suresnois. « Je suis infirmière puéricultrice et dirige en temps normal la crèche Ma Mère l’Oye. Depuis le confinement, je suis au CMM où l’on se relaie avec d’autres infirmières des crèches de Suresnes pour orienter les patients qui appellent ou se présentent, physiquement, au centre, par le biais d’un questionnaire adapté », détaille-t-elle. Ce premier état des lieux lui permet notamment d’identifier les possibles cas de Covid et de les diriger vers le parcours du rez-de-chaussée qui leur est dédié. « Attention, nous ne faisons pas de diagnostic. Ce sont les médecins qui décident ensuite, si le cas est avéré, et en fonction de la gravité ce qui va être mis en place. »
Confinement J30, 15h. Le Docteur Catherine Lipatoff raccroche son téléphone, soulagée. Un collègue
qui partage son temps entre le CMM et l’hôpital Foch vient de lui apprendre qu’un patient touché par le virus qu’elle y avait envoyé en urgence est tiré d’affaire. « J’ai eu deux cas très sérieux de Covid au début de l’épidémie. Pour l’un j’ai appelé le 15, très rapidement une équipe est venue le chercher pour l’hospitaliser. Dans les deux cas il s’agissait d’hommes de plus de 65 ans. Ils avaient une forte détresse respiratoire. Notre rôle de médecine de ville est aussi de faire en sorte que les malades qui peuvent rester chez eux n’aillent pas à l’hôpital, que nous les soignions à leur domicile, à distance, en les rappelant tous les jours », décrit le Docteur Lipatoff. L’objectif étant bien sûr de désengorger les structures hospitalières à commencer par les urgences. « La population doit aussi être consciente que l’on peut être traité chez soi, même avec de petites complications », ajoute-t-elle.
Un ou deux médecins sont donc présents au CMM tous les jours, du lundi au samedi matin pour assurer le suivi des patients du centre (Covid ou non ), de ceux n’ayant pas de médecin traitant, des patients Covid sans gravité qui sortiraient de l’Hôpital. Ils font également le lien avec le centre 15 pour l’orientation des patients sans médecin traitant présentant des formes aigües du virus et nécessitant une hospitalisation. Confinement oblige, « alors que les consultations étaient auparavant programmées et se faisaient uniquement en présentiel, à présent tout se passe essentiellement par téléphone. »
Confinement J30, 17h. Dominique Lacoutière transfère à Philippe Guinet l’appel d’une personne devant contacter un dentiste de toute urgence. Tous les jours, un dentiste ou l’assistante dentaire assurent une permanence téléphonique pour gérer les cas à distance lorsque c’est possible et réorienter les patients en cas d’urgence. Quelques mètres plus loin, d’autres professionnels mènent d’autres échanges téléphoniques : il s’agit de la cellule de veille psychologique du CLSM.
La fin de la journée au CMM approche. Chacun ôtant sa blouse de protection s’assure qu’il dispose du matériel suffisant.
Le centre peut disposer de stocks de masques FFP2 ou de masques chirurgicaux (grâce aussi aux dons d’entreprises et de la Région)., de blouses et de lunettes, .
Par ailleurs le personnel technique de nettoyage est présent tout au long de la journée pour nettoyer les poignées de portes, boutons d’ascenseurs, rampes d’escaliers en plus du nettoyage habituel des locaux… Les cabinets médicaux font l’objet d’une désinfection régulière, voire entre chaque patient après une suspicion COVID. Cela doit participer au fait que chacun se sente en sécurité et que le stresse des agents soit apaisé. « Mais vous savez, soigner, au sens large, c’est notre cœur de métier », sourit le Docteur Lipatoff.
Confinement J30, 17h30. Isabelle Landemaine se glisse derrière le volant de la voiture de son mari qui, lui, télétravaille. Dominique Lacoutière quant à elle, s’apprête à gravir le mont Valérien. Les rues sont toujours aussi dépeuplées. Demain sera une autre journée particulière.