ÎLOT DUCLAUX, chronique d’une métamorphose exemplaire

juin 2019

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D’une architecture soignée, ses logements sociaux, ses ateliers d’artisans d’art et sa pension de famille ont été officiellement inaugurés le 15 avril. Empreint d’harmonie et d’équilibre, organisé autour d’un jardin et d’une verrière, le nouveau visage de l’îlot Duclaux marque l’aboutissement d’un travail de requalification aussi patient que complexe mené depuis plus de 25 ans.

Certains ont posé leurs cartons en septembre, d’autres retrouvé un toit il y a quelques mois ou sont encore en train de ranger leurs outils dans leur nouvel atelier. Les différents occupants de l’îlot Duclaux investissent petit à petit les lieux inaugurés le 15 avril. Une inauguration qui intervient au terme de plus de 25 ans d’action menée par le maire Christian Dupuy et la municipalité, et coordonnée par la Société d’économie mixte d’aménagement Citallios. À commencer par un méticuleux relogement de l’ensemble des résidents des anciens bâtiments, dans le parc social ou dans un bâtiment acheté et réhabilité par la Ville, rue Darracq. Dès sa genèse, l’îlot faisant le lien entre les rues Rouget de Lisle et Duclaux, devait faire la part belle à la diversité, tout en conservant son caractère social et veiller à respecter un équilibre entre activités, ressources et origines de ses occupants. Qui sont-ils ?
Au rez-de-chaussée, l’on retrouve 11 ateliers qui constituent la galerie de « La Verrière ». Une journée portes ouvertes avec inauguration officielle est prévue en septembre. Inspirée des célèbres passages couverts parisiens, elle permet aux artisans d’art de donner libre court à leurs savoir faire et talents. Car dans l’expression « artisans d’art », les deux termes ont autant d’importance. Ils constituent un patrimoine et une signature de Suresnes que la municipalité tenait à pérenniser et mettre en valeur.
Un dernier local fait encore l’objet de négociations entre la Ville et le futur locataire. Néanmoins, l’on sait déjà que ce dernier portera une toque blanche. Dans quelques mois, c’est en effet un restaurant, qui ouvrira dans la galerie.
Dans les étages, 69 logements de type PLS (*) contribuent à maintenir la diversité au sein du parc social de la commune. La pension de famille gérée par l’association Aurore, comprend, elle, 25 petits appartements aux loyers très bas. Ses résidents sont des personnes éloignées du logement, victimes d’accidents de la vie, à qui il s’agissait bien sûr de redonner un « chez soi » tout en les valorisant par un cadre agréable et de qualité et un accompagnement « familial ».
(*) Prêt locatif social, il s’agit du plafond de ressources le plus élevé du logement social.

Cliquez sur une image pour visionner la galerie en entière.

Interview CHRISTIAN DUPUY,
Maire,
vice-président du conseil départemental des Hauts-de-Seine
et vice-président du territoire Paris Ouest La Défense

Suresnes mag : L’îlot Duclaux tel qu’il vient d’être inauguré répond-il aux objectifs que vous vous étiez fixés ?
Christian Dupuy : Absolument. Le bâtiment d’origine, un ancien hôtel ouvrier, était dans un état de délabrement avancé et certains des copropriétaires étaient dans une quasi indigence, d’autres aux retraites modiques n’étaient pas éligibles au logement social. Nous avons dû batailler pour procéder à des expropriations, sans pour autant mettre les gens dehors mais en les relogeant. Nous avons effectué un travail de dentelière. Pour les personnes à faibles ressources, nous avons acheté puis réhabilité un immeuble rue Darracq, dont les appartements
ont été revendus au même prix du mètre carré aux propriétaires occupants de Duclaux. D’autres ont retrouvé des logements ailleurs ou sont devenus locataires du parc social. Ce fut un processus extrêmement long. En tout, depuis la première expropriation, il s’est écoulé plus de 25 ans. Cela illustre la nécessité de laisser du temps aux politiques pour agir. D’ailleurs le récent Grand débat a permis de rappeler qu’il faut de l’expérience, exercée au niveau local, pour ne pas se tromper. Je le vois à la fédération des offices de l’habitat, lorsque des élus ont l’expérience de plusieurs mandats, et quelle que soit leur étiquette, ils arrivent aux mêmes conclusions : il faut un habitat diversifié.

S. M. : Est-ce pour cette raison que le programme comprend des habitats et activités divers ?
C. D. : Dès le début je souhaitais une pension de famille et des artisans. Ces derniers quittaient Paris et la première couronne à cause des loyers. Et pour moi il faut conserver ces activités, qui font partie de notre histoire tout en apportant de la diversité au sein de la cité. Nous voulions montrer que l’artisanat était une voie d’excellence et relevait de la création artistique. Le système éducatif, en favorisant l’enseignement général, étouffe les vocations, du coup nous perdons des savoir-faire précieux. A l’inverse, j’estime qu’il faut valoriser l’artisanat et cette galerie constituera une vitrine. On trouve également une pension de famille qui est le type d’hébergement le plus à même de remettre en selle des gens qui ont eu des difficultés dans leur vie. Ce logement pérenne, sans limitation dans le temps, où l’on pratique un accompagnement bienveillant, doit leur permettre de se reconstruire notamment au niveau médical et d’envisager un retour à l’emploi. Au début du projet, j’avais rencontré Xavier Emmanuelli, alors Secrétaire d’État auprès du Premier ministre d’alors, Alain Juppé, chargé de l’Action humanitaire d’urgence afin d’obtenir un appui financier pour monter une telle structure. Il nous a fortement soutenus, d’autant qu’il était très attaché au concept.

S.M. : En quoi cet ensemble est-il exemplaire ?
C. D. : Le reste de l’îlot est entièrement composé de logement social, en PLS, c’est-à-dire à la lisière du logement intermédiaire, puisque je pense qu’il ne faut pas mettre dans un même ensemble uniquement des personnes rencontrant les plus graves difficultés financières, sociales ou d’insertion professionnelle. Beaucoup de tensions, dans les zones urbaines, sont dues à une sorte de ségrégation géographique. La loi SRU est censée y remédier alors que c’est l’État lui-même qui avait décidé de ce zonage puisqu’avant la décentralisation c’était le préfet qui décidait des permis de construire. Et c’est ce même État qui par la loi SRU impose des sanctions aux villes qui n’ont pas un certain taux de logements sociaux sans prendre en compte leurs disponibilités foncières pour pouvoir en construire. L’État fait racheter ses erreurs par d’autres. J’insiste : à Suresnes, nous avons à coeur de maintenir une mixité sociale équilibrée. Nous étions à 45% de logements sociaux quand nous avons été élus pour la première fois. Nous avons baissé cette proportion dans les nouveaux programmes pour arriver à un équilibre tenable, permettant une vie harmonieuse entre les différentes catégories sociales dans une ville empreinte de diversité. Cette opération est emblématique de notre action pour faire évoluer Suresnes. D’ailleurs, Henri Sellier l’avait compris bien avant les autres.

S. M. : L’architecture de l’îlot Duclaux est particulièrement soignée.
C. D. : C’est une constante dans mon action : tout ce qui relève du social doit être valorisant. Il y a d’ailleurs eu beaucoup d’allers-retours avec les architectes. Notre politique est à l’opposé du misérabilisme. Il faut tirer vers le haut avec empathie et sans apitoiement. Un des moyens pour y parvenir est de ne pas renvoyer aux habitants du parc social une image négative.

Galerie La Verrière
À Suresnes, les métiers d’art ont de l’avenir

Au coeur du projet Émile-Duclaux, la galerie des métiers d’art « La Verrière » a été pensée pour accueillir des artisans d’art d’exception, avec plus de 1000 m2 d’ateliers. Les premiers se sont déjà installés.

Reliant le carrefour de la rue de Verdun et de la rue Émile Duclaux à la rue Rouget de Lisle, la création du passage La Verrière traduit le souci de la Ville de préserver le patrimoine culturel et le savoir-faire reconnu des artisans d’art français, qui pourraient bien disparaître discrètement en Île-de-France si on n’y prenait pas garde. Clé du problème : permettre à ces professionnels de trouver des petites surfaces d’ateliers à prix maîtrisé proches de la capitale. Si certains métiers sont bien connus du grand public, comme celui d’ébéniste ou de tapissier, d’autres, plus rares, méritent d’être découverts : céramiste, restaurateur de peintures, sellier-maroquinier, fabricant de luminaires, bijoutier… 281 métiers spécifiques sont recensés par l’Institut national des métiers d’art, tous « caractérisés par la maîtrise de gestes et de techniques en vue du travail de la matière et nécessitant un apport artistique ». Au terme d’un long et complexe travail pour concevoir et installer ce lieu, les 11 ateliers prennent vie peu à peu au sein de la galerie suresnoise où les artisans d’art ont trouvé des locaux adaptés à leur activité à un loyer attractif. Tous ont été choisis pour la qualité de leur savoir-faire et leur compétence à gérer une entreprise, par un comité de sélection composé par la Ville autour de personnalités appartenant à des organismes de référence : l’Institut national des Métiers d’Art, la Cité de la céramique de Sèvres, le syndicat professionnel Ateliers d’Art de France (fédérant 6000 artisans d’art), l’école nationale des Arts décoratifs, la chambre des métiers et Michel Crozemarie (L’Atelier conseil) qui accompagne les plus prestigieuses maisons de luxe françaises et internationales. La galerie suresnoise s’inscrit ainsi dans une politique de service public en faveur de la création artistique et participe au soutien et à la valorisation des métiers d’art. Ce patrimoine immatériel fait partie de la culture française. Aucun autre pays au monde ne présente une aussi grande diversité de pratiques et de savoir-faire. Un terreau bien vivant en perpétuelle évolution, porteur d’histoire et d’innovation.
Dans une architecture d’inspiration Art Déco conçue suivant le modèle des galeries parisiennes, avec verrière, vitrines et grilles de fermeture, sur un lieu privilégié entre La Défense et Paris, desservi par deux gares de la ligne 2 du tramway, les artisans vont pouvoir exercer leur activité tout en rencontrant leurs clients qui pourront profiter du jardin paysager traversant le passage et d’un restaurant qui verra le jour dans les prochains mois.

Jean-Louis Testud, adjoint au maire délégué au Commerce et à l’artisanat
« La galerie artisanale a été conçue comme un véritable lieu de vie et d’échange pour ces professionnels, hommes et femmes de passion. C’est aussi un lieu de découverte où les Suresnois pourront voir les artisans d’art travailler, avec une dimension pédagogique à même d’éveiller la curiosité des plus jeunes et, peut-être, de susciter des vocations pour ce secteur qui constitue un gisement d’emploi trop souvent sous-estimé »

3 questions à PHILIPPE HUPPÉ, président de l’association Villes et métiers d’art, député de l’Hérault, à l’initiative d’un rapport commandé par le Premier ministre en 2018, formulant des propositions permettant de préserver et de développer les métiers d’art et du patrimoine vivant.

Suresnes Mag : Quelle est la principale difficulté rencontrée par les professionnels des métiers d’arts en Île-de-France?
Philippe Huppé : Plus que des différences d’une région à l’autre, on distingue plutôt villes et espaces ruraux. La principale difficulté dans les grandes villes, c’est le prix de l’immobilier qui peut les empêcher de s’installer ou de se lancer. Les ateliers s’éloignent des coeurs de ville et des flux économiques. Les artisans peuvent produire dans leurs ateliers mais, isolés au fin fond de la banlieue ou de la campagne, ils n’arrivent pas à vendre. Les collectivités peuvent les aider à conserver leur activité à proximité des centres économiques, notamment en mettant à leur disposition de l’immobilier pas trop cher.
S. Mag : En quoi sont-ils facteurs de dynamique économique ?
P. H. :
Ce ne sont pas des métiers rares ou anciens, ce sont des métiers modernes qui ont un véritable avenir. L’industrie du luxe notamment s’appuie énormément sur ces métiers du savoir de la main, sur l’image de ces productions « Made In France ». La dimension « emploi » n’est pas négligeable. À l’heure actuelle, il y a 63 % de reconversion dans les métiers d’art, des gens entre 35 et 40 ans, qui généralement ont fait des études, ont déjà eu des emplois valorisants et à responsabilité et qui, à un moment, veulent changer de vie et produire avec leurs mains. Parmi eux, 57 % sont des femmes. C’est une évolution. Il y a un vrai poids économique derrière. Les métiers d’art représentent entre 60 et 70 000 entreprises en France, 125 000 emplois. On y découvre aussi des trajectoires humaines exceptionnelles.
S. Mag : En quoi une initiative comme celle de Suresnes contribue-t-elle à les aider?
P. H. : L’immobilier coûte cher dans la périphérie parisienne. Associer un bailleur social à ces ateliers conjointement à du logement est une idée originale et innovante. C’est une des pistes à suivre et la collectivité y gagne aussi. Ça crée de l’emploi sur place, des gens qui vont eux aussi consommer dans la ville, attirer du monde, faire vivre et animer le quartier. Les regrouper en un même lieu permet à chaque artisan d’art de bénéficier de l’attractivité de son voisin. C’est très malin. Une très belle initiative de la ville et un beau soutien.

Valérie Béthouart-Dolique, conseillère municipale en charge des Métiers d’art
 » Nous avons pour ambition que la Galerie La Verrière devienne une référence en Île-de-France, qu’elle contribue au rayonnement des métiers d’art et à préserver ce patrimoine vivant. L’engagement de longue date de Suresnes sur une galerie des métiers d’art a été précurseur et de grandes entreprises comme LVMH ou Chanel développent aujourd’hui des produits similaires. ”

Pension de famille
BIENVENUE CHEZ VOUS

La pension de famille gérée par l’association Aurore au coeur de l’îlot Duclaux permet à des personnes seules et quelques couples éloignés du logement de retrouver, enfin, un appartement. Souvent victimes d’accidents de la vie, ils bénéficient d’un accompagnement social.

Pour les lecteurs de Balzac, le terme « pension de famille » rappelle celle tenue par Madame Vauquer et où réside le Père Goriot. Dans le roman du même nom, la bâtisse sent le renfermé et l’humidité. En 2019, à Suresnes, dans la salle commune de la pension de famille de l’îlot Duclaux, cela sent l’avenir et le café fraîchement préparé. Quant au concept, il a sensiblement évolué depuis le XIXe siècle. La pension que gère l’association Aurore depuis le 18 octobre accueille des personnes isolées et des couples, aux faibles ressources, en grande exclusion et souvent issues d’un parcours dans la rue ou en centre d’hébergement. Entourées par un travailleur social et un maître de maison résidant sur place, elles y occupent 20 appartements destinés à des personnes seules et 5 à des couples et ont accès à la fameuse salle commune, où des petits déjeuners, des rencontres et divers ateliers, artistiques ou de français, sont organisés, afin de tisser des liens. En se posant ainsi, elles peuvent se stabiliser. Après avoir signé trois documents, un titre d’occupation, un contrat de séjour et un règlement de fonctionnement, les résidents peuvent rester autant de temps qu’ils le désirent. « Afin de faciliter leur installation, nous mettons en place des outils pour qu’ils puissent gérer leur logement, son entretien, faire leurs courses et cuisiner tout en parvenant à payer leur loyer. Nous les épaulons ici pour obtenir les aides auxquelles ils ont droit comme l’Aide personnalisée au logement (APL), s’inscrire à l’épicerie sociale de la Croix Rouge, ou mettre en place des soins infirmiers s’ils en ont besoin dans le cas d’une prise de traitement, puisque le retour à une bonne santé est aussi une de nos priorités », explique Imane Bouhouria, la directrice de la pension. Écoute et bienveillance étant de rigueur face à certaines addictions ou consommations excessives.

Mixité
La valorisation de soi est un levier important de leur réinsertion d’autant que le passage, du jour au lendemain, à la vie en appartement peut être source d’angoisse pour certains. « Un résident qui n’avait pas de domicile, ouvrait dans les premiers temps en permanence la fenêtre, pour rester connecté à la rue », illustre la directrice. Cela peut également passer par des sorties. « Nous avons proposé une initiation à la zumba, d’assister à des spectacles ou à des matchs de foot ou de visiter le Sénat », liste-t-elle. Si l’îlot Duclaux est synonyme de mixité, la pension de famille n’en manque pas puisque les résidents sont âgés de 32 à 74 ans. Ces derniers ont été recommandés par les réservataires, c’est-à-dire les institutions ayant financé la pension : ville de Suresnes (7 logements dont deux pour des couples), État, Région, bailleur 3F. Leur candidature a été étudiée par l’équipe socio-éducative de la pension qui a évalué le cas de chacun, ses besoins, notamment en matière de santé, identifié l’accompagnement nécessaire. « On s’intéresse également au côté budgétaire, ajoute Imane Bouhouria. Après une seconde rencontre et la visite d’un logement nous donnons notre réponse. Si elle n’est pas favorable, nous tentons de faire une autre proposition à la personne. » Pour l’instant plus de vingt personnes ont trouvé ici un vrai « chez soi », où il n’y a pas d’horaires à respecter, où l’on peut recevoir et partir en vacances, simplement après l’avoir signalé. Un véritable lieu de vie qui séduit : il ne reste plus que 4 appartements disponibles.

 

Aurore à Suresnes c’est aussi :
Le Centre d’hébergement et de stabilisation Solea de la rue Pierre Dupont. Il propose des « hébergements stables pour prendre le temps de redevenir acteur de ses projets et de recréer du lien social. » Il accueille des familles et des personnes seules dans 9 logements partagés et autonomes tout en les faisant bénéficier d’un accompagnement social et d’activités collectives.
Le centre, qui comprend 42 places (20 adultes et 22 enfants), est dirigé par la même cheffe de service que la pension de famille, 2 travailleurs sociaux et un maître de maison. « Grâce à notre partenaire Odyssée vers l’emploi, un accompagnement autour de l’insertion professionnelle a permis à dix résidents de retrouver une activité professionnelle ponctuelle ou pérenne en 2018. Ainsi, trois personnes ont abouti à l’obtention d’un contrat en CDI. Aujourd’hui, nous collaborons aussi avec le service Vie économique et Emploi de la Ville, toujours sur l’accompagnement professionnel des résidents », souligne Imane Bouhouria, qui dirige également le Centre.

 

Nadia Abbas
« Ici je me sens bien »

C’est peut-être l’accompagnement social qui est le plus important pour Nadia. « Azize, le maître de maison, m’a emmenée à la banque pour que je puisse avoir ma propre carte bancaire, et regardez, ici je peux faire plein d’activités, comme fabriquer des objets décoratifs, et nous allons voir des spectacles. C’est comme une famille, ils sont adorables. » N’en jetez plus, la coupe aux compliments, mérités, est pleine. Rejoindre la pension de l’îlot Duclaux semble salvateur pour Nadia qui sort ainsi d’une expérience chaotique en foyer après s’être retrouvée à la rue consécutivement à son divorce. Un havre « chaleureux » qui va lui permettre de « retrouver la santé et s’engager dans une formation dans l’aide aux personnes âgées ou aux enfants ».

 

Pascal Alessandri
« C’est tout neuf, calme et propre »

Son parcours ressemble à une descente aux enfers, une succession d’accrocs de la vie aux conséquences dramatiques. Un profil typique des résidents de la pension de famille de l’îlot Duclaux. Pendant longtemps tapissier à Paris, Pascal Alessandri avait changé de métier en prenant en charge des rayons de magasins de la grande distribution, avant de lancer sa propre boutique de fruits et légumes, rue Michelet, déjà à Suresnes. C’était en 2009, « au plus mauvais moment », reconnaît ce dernier, qui peut enfin se reconstruire au sein de la pension de famille de la rue Duclaux, à quelques dizaines de mètres de là. « J’avais beaucoup investi, notamment dans une chambre froide, je me rendais à Rungis à 3h du matin, mais par manque de clients et à cause d’une mauvaise gestion, je l’avoue, l’affaire s’est cassé la gueule au bout de six mois ». Un monde qui s’écroule d’autant que Pascal n’avait droit à rien. De graves problèmes pulmonaires l’empêchent de travailler. « Je me suis retrouvé au RSA, je dormais de droite et de gauche, puis me suis retrouvé pendant 4 ans à l’hôtel », raconte-t-il. À 58 ans, son assistante sociale l’a orienté vers la pension, où il s’est installé en décembre. « Ce que je me suis dit alors ? Ouf ! J’en avais marre de me balader et je retrouve un quartier où l’on me connaît ! C’est tout neuf, calme et propre. » L’équipe de la pension va aussi l’aider à monter un dossier de travailleur handicapé. Et l’on sent que l’environnement de la pension, apaisé, comme une béquille, lui permet de faire des projets. Ce malicieux ancien de l’école Boulle a par exemple proposé à son médecin de refaire ses fauteuils Louis XV un rien défraîchis.

 

Denis Chupin
« Développer une vie sociale »

« Je me suis retrouvé à la rue après le décès de ma tante. Elle m’hébergeait après que je m’étais séparé de ma copine. » C’est aussi son assistante sociale qui lui a parlé d’Aurore et de la pension de famille de Suresnes, en lui rappelant qu’il fallait « participer à la vie et aux activités de la maison ». Alors après plus de six mois à dormir dans des parkings ou des cages d’escaliers, lors de son emménagement dans la pension en décembre, Denis a tout simplement « ressenti du bonheur. Disposer d’un vrai pied à terre permet de mieux respirer. » Et de regoûter à une vie « normale », de manger et se laver, tout en développant une vie sociale en discutant avec les autres résidents mais aussi l’équipe. « Ce sont des gens très humains, cela m’aide tout autant que le suivi psychologique qui m’est nécessaire ». Cela dit dans un sourire où l’on discerne de l’apaisement chez celui qui a enchaîné de nombreux métiers mais surtout fut photograveur, lui le passionné de photo.

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