« La Police fait aussi partie de la chaîne de santé »

avril 2020

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Santé, éducation, aide sociale, propreté, sécurité, les Suresnois mesurent en cette période toute l’utilité de leurs services publics, dans tous les domaines. Sandrine Contrepois, commissaire de police de Suresnes, explique comment la police agit quotidiennement auprès de la population dans une mission de prévention pour stopper la propagation du virus.

 

Suresnes-Mag : Comment le commissariat de Suresnes s’est-il organisé depuis l’annonce du confinement ?

Sandrine Contrepois : Pour ne pas avoir à craindre de rupture de notre service public, il a d’abord fallu penser à protéger de l’épidémie les effectifs du commissariat (80 personnes). Nous avons divisé le commissariat en deux zones et nous nous sommes organisés selon un mode Equipe A et Equipe B en roulement, qui ne se croisent pas. Au cas où une équipe serait contaminée par le virus, nous avons constitué une équipe dite « réserve » pour intervenir. Nous continuons à exercer nos missions quotidiennes de protection de la population même si la crise sanitaire les a réorientées fortement sur l’objectif du confinement strict décidé par le Gouvernement.

S-Mag : Quelles autres mesures pour protéger vos équipes du coronavirus ?

S.C. : Ils sont dotés de gants, de gel hydroalcoolique et de masques chirurgicaux qui ont plus vocation à protéger nos interlocuteurs que celui qui porte le masque. Cela ne remplace donc pas les mesures de distanciation par rapport aux personnes y compris les collègues. La promiscuité dans les véhicules impose à chacun de mettre un masque lorsqu’ils montent en voiture. A chaque relève, on nettoie les véhicules. Dès qu’un effectif présente des symptômes, il reste chez lui et nous demandons l’intervention d’un service spécialisé de la Police pour désinfecter son bureau.

Pour les enquêteurs qui sont confrontés à des décès dont il s’avère que la personne était positive au coronavirus, nous avons été dotés de lunettes de protection et de combinaisons. Les lunettes servent aussi lors d’interpellations de personnes un peu agitées. Le risque de contamination demeure dans notre métier. Jusqu’alors, nous n’avons eu qu’un seul collègue testé positif. D’autres ont présenté des symptômes mais n’ont pas pu être testés. Personne chez nous n’a dû être hospitalisé pour Covid.

S-Mag : Peut-on encore se rendre au commissariat de Suresnes

S.C. : Nous avons conservé l’accueil avec un sas à l’entrée et nous limitons le nombre de personnes dans notre salle d’attente. Nous ne recevons que pour ce qui est urgent. Tout le monde n’a pas connaissance de la possibilité de dépôt de pré-plainte en ligne, sur Internet. Nous ne prenons plus les déclarations de perte de carte d’identité. D’eux-mêmes, les gens ne se présentent plus au commissariat quand cela n’est pas une urgence.

S-mag : Comment l’activité de la police nationale a-t-elle évolué en ville ces dernières semaines?

S.C. : Les gens étant moins dehors, nous avons moins d’activités habituelles. Le nombre de cambriolages, par exemple, est en chute vertigineuse, tout simplement parce que les gens sont chez eux depuis le 16 mars. Et quand ils n’y sont pas, tous leurs voisins autour le sont. Cela nous a permis notamment de réorienter nos équipes sur les commerces fermés. Nous veillons sur eux. D’une manière générale, les statistiques de toutes les catégories d’infraction sont à la baisse. : circulation, atteintes aux personnes… Nous avons aussi moins d’événements publics à sécuriser.

« La Police fait aussi partie de la chaîne de santé, dans un rôle préventif pour éviter des contaminations »

Sandrine Contrepois, Commissaire de Police de Suresnes

S-Mag: Priorité, donc, au respect des mesures de confinement. Comment cela se passe-t-il à Suresnes

S.C. : Même si nous faisons beaucoup de pédagogie, nous passons encore pour les méchants, ce qui n’est pas toujours facile pour les collègues dans une situation aussi compliquée que celle qu’on subit tous en ce moment. Mais il est quand même essentiel, contre la propagation de l’épidémie, de faire respecter les mesures de confinement et les restrictions de déplacement.

La Police fait ainsi partie de la chaîne de santé, dans un rôle préventif pour éviter des contaminations et l’engorgement des hôpitaux. Après la pédagogie, la partie ingrate de la mission consiste à verbaliser les personnes qui font n’importe quoi. Ça ne fait jamais plaisir aux contrevenants qu’on leur donne une amende, mais peut-être allons-nous contribuer, en limitant leurs velléités de sorties par la suite, à éviter qu’ils soient contaminés.

S-Mag : Comment cette mission est-elle coordonnée avec la police municipale ?

S.C. : La Police municipale nous communique chaque jour l’état de ses verbalisations pour la tenue de l’échelle croissante des amendes en cas de récidive. Nous nous répartissons les secteurs de manière coordonnée. Mais il n’y a pas que les effectifs de police de Suresnes qui agissent sur la ville. Nous avons aussi des renforts départementaux et, régulièrement, des CRS à Suresnes.

S-Mag : Avec le confinement, certaines violences sont en augmentation. Et à Suresnes

S.C.: Celles au sein du foyer, faites aux femmes ou sur mineur, partout en France. Nous intervenons systématiquement à chaque signalement. Les gardiens d’immeubles et les gens en général sont un peu plus vigilants, attentifs aux signes perceptibles dans leur voisinage, parce que les médias en parlent. Le confinement dans un petit appartement ne justifiera jamais aucune violence.

S-Mag : Avez-vous constaté une évolution du comportement des gens vis-à-vis des policiers ?

S.C : Les gens sont moins tendus qu’au début. Ils semblaient ne pas avoir mesuré que l’épidémie était quelque chose de très sérieux avant de voir le nombre de morts se multiplier. Le « Monsieur tout le monde » qui, d’un seul coup, recevait une amende prenait ça plutôt mal et parlait mal aux policiers. A présent, les personnes verbalisées ont davantage le sentiment d’être réellement fautives.

Tout le monde a, chaque fois, une bonne excuse pour ne pas respecter les règles de confinement et les motifs de dérogation de sortie. Bien sûr, nous comprenons souvent. Mais nous sommes là pour faire appliquer une règle commune du confinement.

S-Mag : Les messages de prévention évoluent-ils

S.C : Nous sommes là pour protéger les gens, pas uniquement pour mettre des PV, mais nous avons parfois l’impression de nous adresser à des enfants qui ne comprennent pas qu’ils font eux aussi partie à la fois du problème et de la solution. Il faut encore expliquer aux parents qu’on peut autoriser une petite balade à un jeune mais pas le lâcher tout l’après-midi pour être tranquille. Au bout d’un mois, il y a du relâchement.

Durant la période de vacances scolaires, avec l’ensoleillement, nous avons constaté la présence de nombreux jeunes dans l’espace public et dans les aires de jeux pourtant fermées. Ces regroupements sont propices au développement de la pandémie et font courir un risque à la fois aux jeunes, à leurs amis et à leur famille. Chacun, parent, adulte, enfant doit comprendre que pour sa sécurité et celle de ses proches, respecter le confinement est essentiel.

 

Pour les plaintes :

www.pre-plainte-en-ligne.gouv.fr

Numéros utiles:

Police (en cas d’urgence) : 17 (ou 112 depuis un téléphone mobile)

Signaler un enfant en danger : 119

Violences Femmes info : 39 19

 

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